Je relis ce que j’ai écris et je revis ce que parfois j’oublis !
Ô bonheur! Ô bonheur! Le temps mange la vie.
Il y a déjà si longtemps que je suis parti et je n’ai toujours pas compris.
Il y a déjà eu tellement d’erreurs commises et nous n’avons toujours rien appris…
A chaque instants je me demande ce que j’aurais pu faire de plus ou de mieux, pour ne pas les décevoir. J’avais envie d’y croire avec eux, de pouvoir leurs dire qu’ensemble on allait réussir à réaliser nos rêves. Mais j’ai été comme tétanisé par ce sentiment profond, me disant, que je n’étais pas encore prêt pour y arriver. Qu’il me fallait grandir encore, pour revenir sans aucune appréhension à propos de ma plus profonde conviction. Toi qui n’y croit plus ! Ne te laisse pas guider par tes craintes. Ne te laisse pas tomber dans l’oublie de ce que tu as intensément vécu ! Un jour où l’autre le temps te donneras raison… Et ce monde nous le changeront, avec ton sourire et ta joie !
Je me rappel avoir écrit que c’est dans chaque contradiction que se trouve la subtile beauté de ce monde. Je comprends alors pourquoi j’aime tant ce pays… À Haïti on voit la vie dans sa « brutale beauté ». Ce contraste, ces nuances, nous éblouissent constamment. Un sourire au milieu de cet incessant chaos, une lumière à travers cette effrayante obscurité de la cité, un silence paisible à l’écart de cette vie étourdissante…
Premier soir à port au Prince et nous partons courir dans la ville. Je découvre petit à petit ce labyrinthe étouffant et mystérieux, que sont les rues de la citée « Delma 33 ». Un peu trop sûre de moi, je décide d’accélérer et de retourner seul à notre point de départ. Les filles me font confiance, alors qu’il commence à ce faire tard. Mais après un kilomètre j’hésite à propos du chemin. Je prend finalement une décision qui m’éloigne complètement de ma destination. Le temps de réaliser mon erreur et de faire demi tour, la ville était déjà presque plongée dans l’obscurité. Je demande alors aux passants si ils peuvent m’aider. Face à leurs moqueries, je réalise à quel point j’avais l’air ridicule, moi le petit blanc qui courrait sous 40 degrés pour le plaisir ! Ils me proposent de me déposer en moto mais je n’avais pas un sous et ici les bons comptes font les bons amis. Je retourne sur mes pas et c’est alors qu’un des jeunes du camps me reconnait et sent que je suis complètement perdu ! Il me prend le bras et m’emporte en courant dans les méandres de la citée. Difficile de vous décrire avec des mots la sensation qui m’envahissait à cet instant. Je me suis laissé transporter par cet enfant qui connaissait chaque secret de ce lieu. Et en plein cœur de la nuit, perdu dans un des pays les plus dangereux au monde. Je me suis senti immortel car insouciant comme cet enfant qui était si fier de pouvoir me transporter dans son univers… Il retrouve facilement la maison où nous habitons et où nous donnons les cours aux jeunes. Mon amie était paniquée et avait prévenu tous les plus grands du quartier que je m’étais égaré. Elle me demande avec crainte si tout allait bien pour moi et s’il ne m’était rien arrivé. Mon incompréhension face à sa question et à l’inquiétude qui en émanait, lui donnait l’impression qu’elle s’exprimait à un enfant auquel on explique les dangers de ce monde…
Mais je ne veux rien entendre , car il n’y a rien d’excitant dans ces sentiers balisés, ces parcours anticipés et ces chemins déjà tracés, de notre existence. Il n’y a rien de palpitant dans la sécurité que l’on nous vends à longueur de journée. Nous offrant, sois disant, une forme de liberté. Qu’est ce donc que la sécurité ? Une sensation qui nous laisse croire aveuglement que nous sommes hors de danger, car tout à été préalablement évalué et calculé. Alors qu’il faut se confronter à la dangerosité pour mieux l’appréhender, qu’il faut parfois se perdre pour se retrouver…
L’infinie nuance de ma vie, plus je lui cherche un sens et plus je me sens déboussolé…
La violence et la compassion , l’amour et la haine, la joie et la peine, ces nuances qui s’entremêle dans l’infinité du temps. Alors que nous luttons pour trouver cet équilibre, si subtil, qui rend nos vie supportable.
Après deux mois à découvrir notre monde, j’ai beaucoup de choses à vous dire! A New-York, comme à Haïti, j’ai ouvert grand les yeux, tendu partout mes oreilles. C’est le témoignage de tous ceux qui ont croisé ma route que je voudrais partager. Car l’opinion de chacun doit être transmise. Souvent les discussions ne correspondaient pas à l’idée que j’ai à propos des sujets discutés. Mais c’est la raison pour laquelle je ne cesse de questionner le quotidien.
J’ai eu la chance d’échanger avec de nombreuses nationalités. Aux Etats-unis avec des kazakhs, des albanais, des turques, des italiens, des américains, un chauffeur de bus libanais et les jeunes français. A Haïti j’ai rencontré l’ambassadeur du Canada et les haïtiens du camps. Une fois renter à Paris un portugais est venu me demander de l’aide. Il galérait à appeler son agence d’intérim car il n’avait pas assez d’argent pour s’offrir un portable. Il en a profité pour me parler de sa vision de la société.
J’ai posé les mêmes questions aux enfants comme aux plus grands, aux personnes issues de tous les milieux sociaux et de toutes les religions. Et j’ai mémorisé chaque intonation, chaque réaction, dans chaque mot qui m’a été transmis. Tout cela bourdonne dans ma tête, nourris mon imagination et donne vie à mon inspiration.
Ce sont ces rencontres et ces expériences vécue à travers le monde, qui me permettent de réaliser à quel point la situation de violence est globale. Et nous sommes tous égarés dans cette quête de sécurité. Et nous courrons tous après ce rêve d’ailleurs, qui, juste ici , se nourrit de nos peur…